31 mars 2008
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La hiérarchisation des principaux facteurs de variation de la digestibilité des fourrages, qu'il s'agisse des espèces (sélectionnées ou composant les prairies permanentes), des conditions de croissance (climat), des pratiques (fertilisation, mode d'exploitation) ou de l'état physiologique (pousses végétatives ou reproductives) nécessite un modèle intégrant l'ensemble de ces facteurs. A cette fin, nous proposons d'enrichir un modèle d'évolution de la digestibilité du fourrage sur pied au cours d'une pousse par des connaissances en écologie et en écophysiologie.
L'objectif de ce papier est de présenter un modèle générique de prévision de la digestibilité de graminées (sélectionnées ou natives) en fonction des modalités d'utilisation (date de récolte, temps de repousse, hauteur de défoliation) et de la nutrition azotée, pour des pousses végétative ou reproductive. Pour disposer d'une vision intégrée de l'ensemble des facteurs de variation, nous présentons un modèle conceptuel fondé sur une représentation de la plante en deux compartiments : l'un métabolique dont la digestibilité de la matière organique est quasi totale, l'autre structural dont la digestibilité diminue au cours du temps du fait d'un vieillissement des tissus. La digestibilité d'une plante dépend alors de la digestibilité des tissus de soutien (fonction de leur âge, de la nutrition azotée et des espèces) et de leur proportion dans la biomasse totale. La proportion de tissus métaboliques diminue en fonction de la biomasse accumulée de manière ontogénique : tout facteur qui augmente la croissance diminue cette proportion. Le modèle empirique utilisé s'appuie sur ce formalisme en le simplifiant. La digestibilité au temps t (D) est exprimée en fonction de la somme des températures journalières accumulées depuis la dernière défoliation ou le début février (somT) pour intégrer son effet à la fois sur la croissance de la plante et sur la différenciation des tissus. La digestibilité des tissus jeunes dépend de l'espèce semée ou du type de graminées des prairies permanentes : des espèces à stratégie de capture (ray-grass anglais, houlque,
) ou conservation (agrostis, fétuque rouge,
) de ressources. Le niveau de nutrition azotée (Ni) a un effet positif sur la digestibilité des tissus jeunes mais accélère sa diminution du fait d'une augmentation rapide de la proportion de tissus structuraux. La longueur résiduelle de la gaine (Lg) permet de prendre en compte l'intensité d'utilisation. Pour calibrer et valider le modèle, au total, 31 et 39 cycles de croissance x années x traitements (fertilisation), respectivement pour le dactyle (digestibilité estimée par la méthode pepsine cellulase) et les prairies permanentes (digestibilité estimée par la spectrométrie dans le proche infrarouge) ont été mobilisés ; chacun d'eux ayant en moyenne 5 dates de mesures pour évaluer la dynamique au cours du temps. Pour les pousses végétatives, on montre que le modèle trouvé pour le dactyle (Dt=a+bNi-cLg dNi.somT), validé pour des repousses de fin de printemps ou d'été, peut être étendu à d'autres graminées (fétuque élevée) ou aux prairies permanentes en ne changeant que le coefficient « a ». Pour les pousses reproductives, la digestibilité des tiges devient inférieure à celle des limbes à un stade plus tardif pour les espèces sélectionnées que pour les espèces natives, respectivement un peu après et un peu avant le stade épi10cm. A partir de ce stade (Tc), la digestibilité de la plante entière diminue 2 fois plus vite que durant la phase végétative, et d'autant plus rapidement que le niveau de nutrition est élevé et que les prairies permanentes sont composées de graminées ayant des stratégies de capture des ressources. Pour le dactyle le modèle s'exprime alors ainsi : Dt= DTc - e.Ni.(1+PFTAB).somT. L'ensemble de ces résultats montre que la digestibilité des graminées peut être prévue de manière simple et relativement précise à partir du type d'espèce, de la somme de températures et du niveau de nutrition azotée. L'utilisation du modèle suppose de connaître la digestibilité des espèces au stade végétatif, ainsi que des dates auxquelles les stades phénologiques sont atteints.
In order to establish a hierarchy among the main factors of the variations of the digestibility of forages (species, physiological stage of the sward, growth conditions, fertilisation or management practices, etc.) it is necessary to integrate them into a single model. Such a model, showing the variations of the digestibility of standing herbage during re-growth, is presented here, strengthened by data from ecology and from eco-physiology.
This model is based on the representation of the plant as being made up of two parts : one, called metabolic, comprises the metabolically active tissues (of which the organic matter is practically wholly digestible), and the other, called structural, which comprises the supporting tissues (of which the digestibility decreases with time). The digestibility of the plant depends then on that of the structural part (varying with age, the nitrogen nutrition and the species) and on the proportion of this part in the total bio-mass. The digestibility of the young tissues depends on the species sown or on the functional type of the grass (in the case of permanent pastures), and on the level of the nitrogen nutrition; the residual length of the leaf sheaths gives an indication of the intensity of use. A model is also proposed for the reproductive shoots. The validity of the model rests upon numerous experimentations. Its use presupposes that the digestibility of the various species at the vegetative stage be known, as well as the dates of the different phenological stages.
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