26 janvier 2018
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Les effets des systèmes d’élevage et de la consommation de produits animaux ont été particulièrement présents dans l’actualité de la dernière décennie. Le rapport « Ombre portée de l’élevage » de la FAO a fortement orienté les débats en mettant en avant la compétition pour l’usage des terres (nourrir les animaux ou les hommes) et la contribution de l’élevage aux émissions de gaz à effet de serre. Conjointement, la consommation excessive de certains produits animaux dans les pays développés est pointée du doigt pour ses effets négatifs sur la santé humaine. Cependant, les enjeux d’environnement et de santé sont encore trop souvent examinés séparément de telle sorte que des pistes d’améliorations prenant en compte ces deux dimensions ne sont encore que peu (voire pas) analysées. Cet article présente une analyse conjointe des impacts positifs et négatifs de l’élevage et de la consommation de protéines animales sur l’environnement et la santé humaine en examinant plus particulièrement l’intérêt d’alimenter les ruminants à l’herbe.
Une alimentation humaine riche en protéines animales a une plus faible efficience énergétique, et génère en général des impacts environnementaux (gaz à effet de serre) plus élevés qu’une alimentation à base de produits végétaux. L’alimentation animale génère également une forte compétition dans l’utilisation des ressources (céréales, eau, énergie) entre l’homme et l’animal. Par ailleurs, un apport excessif en viande rouge et produits animaux transformés accroît le risque de certaines maladies chroniques. Si la réduction de la part des protéines animales dans le régime alimentaire des Européens est une option de plus en plus privilégiée par les scientifiques pour améliorer conjointement l’empreinte environnementale et santé de nos régimes, les systèmes herbagers permettent de maximiser les synergies entre ces bénéfices environnementaux et santé. Ici, nous examinons, à partir des données françaises, les conséquences de deux pistes de changement. La première consiste à réduire les protéines animales consommées sur la base de deux options : abaisser leur consommation dans la ration humaine de 22%, pour les aligner sur la consommation de protéines totales recommandées, ou de 34%, pour également équilibrer les protéines d’origines animales et végétales. Cette dernière option dans laquelle les prairies auraient un rôle accru, conduirait à supprimer le maïs pour alimenter les ruminants. La seconde piste enrichit un scénario développé récemment par plusieurs travaux prospectifs dans lequel il est préconisé d’utiliser exclusivement des ressources non directement valorisables par l’homme pour nourrir les animaux d’élevage : les surfaces toujours en herbe, et les coproduits agroindustriels en particulier pour nourrir les monogastriques. Cela conduirait à réduire de 50% la consommation de produits issus de ruminants. Pour affiner cette option, nous avons examiné l’intérêt (i) de conserver également des prairies temporaires à base de légumineuses du fait des services qu’elles fournissent à l’agriculture, et (ii) de généraliser les races mixtes à double finalité -lait et viande- pour réduire certains impacts environnementaux. La dernière partie de l’article s’attache à identifier les principaux verrous à la mise en œuvre de telles options (politiques publiques, organisation des filières, lobbies), et propose des pistes concrètes pour les lever.
DURU M., DUMONT B., BENOÎT M. & al., 2017. Quelle place pour l’élevage, les prairies et les produits animaux dans les transitions agricoles et alimentaires ? Fourrages n°232, p. 281-296.
In recent years, studies have underscored the negative effects of livestock systems and diets high in animal products. However, environmental and health impacts are often considered separately. In Europe, scientists have indicated that the best way to reduce such impacts is to reduce the dietary intake of animal proteins. Grass-based systems could help in this regard. Here, we examined the consequences of pursuing different types of solutions: 1) reducing the dietary intake of animal protein (by 22%, to bring current intake in line with recommended intake, or by 34%, to accomplish the same but also increase the relative reliance on vegetable protein) or 2) raising livestock exclusively using resources that humans cannot exploit for food. The main ways of implementing such strategies are examined, and concrete suggestions are provided.
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