Intérêt de la luzerne pour l’alimentation des ruminants
Les légumineuses ont des atouts nutritionnels qui permettent d’augmenter l’efficacité des rations, notamment avec les protéines qu’elles apportent qui peuvent rééquilibrer le rapport PDI/UFL. Cet article est consacré à la luzerne.
La luzerne dans les tables INRA (2007)
Les différents types de luzernes conservées ont des valeurs de dMo (digestibilité de la matière organique) sensiblement plus faibles que celles des trèfles. Les valeurs d’encombrement sont supérieures à celles des trèfles ce qui limite son l’ingestibilité.
Les teneurs en MAT dépendent des formes de récolte utilisées. Ce fourrage est en effet sensible à la perte des feuilles, où se trouve une grande partie de la matière azotée, lors des étapes de séchage et de récolte. Cette teneur en MAT reste cependant élevée. L’association avec des graminées dans la ration permet d’améliorer l’efficacité de l’utilisation de l’azote.
dMo (%) | UFL /kg MS | MAT (g/kg MS) | PDIE/UFL (g/UFL) | |
Luzerne en ensilage coupe fine et conservateur | 65 | 1,04 | 182 | 87 |
Luzerne en ensilage coupe fine préfané | 63 | 1,01 | 193 | 92 |
Luzerne en enrubannage | 62 | 1,02 | 179 | 109 |
Luzerne en foin fané au sol | 56 | 1,04 | 163 | 140 |
Ensilage et enrubannage de luzerne : des aliments efficaces
M. Rouillé a mené en 2009 un essai dans un ferme proche d’Angers avec du foin et de l’ensilage de luzerne pour faire face à un déficit de maïs. 50 % de la ration des vaches laitières étaient remplacés par un des 2 fourrages. Sous forme d’ensilage, les performances laitières se sont maintenues.
Par contre, le foin qui était de bonne qualité et bien haché, a entrainé une diminution significative de la production de lait et d’une baisse du Taux Protéique et du Taux Butyreux, bien que l’ingestion ait augmenté.
Cet essai a mis en évidence que la luzerne permettait de réduire les apports de correcteurs azotés nécessaires pour compenser l’utilisation d’ensilage de maïs et assurait un bon apport de fibres permettant ainsi de diminuer les acidoses.
Plus récemment (2016), un essai a été mené à la station expérimentale de la Jaillière avec de la luzerne enrubannée de bonne valeur nutritive (UFL=0,82, PDIN=125 g, PDIE=78 g) dans une ration de vaches laitières à base d’ensilage de maïs et de tourteau de colza. Les niveaux de production de lait et les taux ont été maintenus et la consommation de tourteau a fortement diminué dans les 2 modalités d’apport de l’enrubanné. M. Baumont a néanmoins précisé qu’il faut rester attentif à la moindre densité énergétique de la luzerne et ne pas atteindre un seuil au-delà duquel l’apport supplémentaire de céréales ne serait plus suffisant pour maintenir les performances de production.
% de luzerne enrubannée dans la ration | Témoin 0 % | Lot 1 14 % | Lot 2 30 % |
Ingestion (kg MS/VL/j) | 24,2 | - 1,8 | - 1,8 |
Dont tourteau de colza (kg MS/VL/j) | 5,9 | - 2,7 | - 3,8 |
Lait brut (kg/VL/j) | 29,2 | - 0,0 | - 2,0 |
Taux butyreux (g/kg) | 44,8 | - 0,9 | + 0,5 |
Taux protéique (g/kg) | 33,6 | + 0,3 | - 0,1 |
Pour la croissance et l’engraissement
La Chambre d’Agriculture de Bretagne a mis en place des essais avec de la luzerne et du trèfle violet enrubannés en remplacement du soja dans des rations d’engraissement à base de céréales de jeunes bovins charolais et limousins. Dans cet essai, les enrubannés étaient distribués à volonté. Nous présentons dans cet article les résultats avec la luzerne. Les niveaux de croissance des jeunes bovins ont été comparables avec la ration témoin et avec la ration à base de luzerne. Il est ressorti des essais que les légumineuses apportent à la fois la protéine et la fibre nécessaires au bon fonctionnement du rumen.
Race | Limousin | Charolais | ||
Lot | Soja | Luzerne | Soja | Luzerne |
Mélange blé + tourteau de soja (kg brut) | 8,4 | - | 9,7 | - |
Paille de blé (kg brut) | 1,5 | - | 1,0 | - |
Enrubanné (kg MS) | - | 2,3 | - | 2,9 |
Blé (kg brut) | - | 7,1 | - | 7,6 |
PDIN/UFV | 109 | 95 | 108 | 85 |
Quantités ingérées (kg MS/j) | 8,6 | 8,5 | 9,4 | 9,6 |
GMQ (g/j) | 1 310 | 1 380 | 1 645 | 1 615 |
UFV/kg gain de PV | 6,5 | 6,0 | 5,9 | 5,9 |
Qualité de la viande et profil en acides gras
Les bovins complémentés avec des légumineuses ont présenté des gras légèrement plus colorés. Et contrairement aux idées reçues, la viande des animaux ayant reçu de la luzerne et du trèfle ne sont pas plus rouges.
Des essais menés dans le cadre du programme Neobif ont mis en évidence une amélioration du profil des acides gras de la viande avec une alimentation à base de luzerne, l’amélioration la plus forte étant faite avec le trèfle violet. Lorsque les bovins sont complémentés avec de la luzerne, la viande présente une augmentation de 16 % des acides gras poly-insaturés Oméga 3.
Composition en AG de la noix du milieu de train de côtes des JB limousins | Soja | Luzerne | Trèfle violet |
Teneur en lipides (%) | 2,0 | 2,3 | 2,7 |
Acides gras saturés totaux (mg/100 g) | 875 | 1 054 | 1 133 |
Ratio C18:2/C18:3 (%) | 14,8 | 9,1 | 7,1 |
Omega 3 totaux (mg/100 g) | 24 | 28 | 44 |
C18:3 (mg/100 g) | 11 | 15 | 28 |
Amélioration du profil des acides gras du lait
Une ration supplémentée avec de la luzerne déshydratée peut présenter un meilleur profil en acides gras grâce à une augmentation du taux des acides gras poly-insaturés, qui sont plus favorable à la santé humaine.
L’effet est par contre plus ou moins visible avec de l’ensilage ou de l’enrubannage de luzerne. « Cela pourrait être lié à des pertes à la récolte, car feuilles et tiges n’ont pas le même profil en acides gras. Si on perd beaucoup de feuilles, où sont stockés les bons acides gras, on déséquilibre le profil du fourrage récolté » précise M. Baumont.
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